Le symbole est fort, la scène, inédite. Quelques heures seulement après avoir pris part à la cérémonie solennelle de la rentrée judiciaire 2025–2026, tenue dans les locaux de la Cour de Cassation fraîchement réinstallés au Champ de Mars, le Premier ministre Alix Didier Fils-Aimé a surpris tout le monde en parcourant à pied une partie du centre-ville de Port-au-Prince.

Sous un soleil ardent, au milieu des policiers, des ouvriers et des curieux, le chef du Gouvernement a marché calmement sur les rues du Champ de Mars, avant de se diriger vers le bâtiment du ministère de l’Intérieur et des Collectivités Territoriales, fermé depuis le gouvernement d’Ariel Henry. Un geste simple, mais lourd de symbolisme, interprété comme un message clair à l’adresse des gangs qui continuent de défier l’autorité de l’État dans plusieurs zones du pays.

Une visite impromptue
Selon plusieurs témoins sur place, la marche du Premier ministre n’était pas prévue dans le protocole officiel. Après la cérémonie judiciaire, il a quitté la Cour de Cassation, salué les magistrats et les représentants du corps diplomatique, puis s’est dirigé à pied, entouré de quelques collaborateurs et agents de sécurité, vers la place du Champ de Mars.
Ce déplacement inhabituel, dans une zone où peu de dirigeants osent encore circuler sans cortège motorisé, a immédiatement attiré l’attention. Des passants se sont regroupés, certains l’applaudissant, d’autres le filmant avec leurs téléphones.
« Le Premier ministre voulait envoyer un message clair : l’État n’a pas peur de marcher dans sa propre capitale », a confié un membre de son cabinet à notre rédaction.

Le retour de la justice et de l’État au cœur de Port-au-Prince
Le même jour, la cérémonie de la rentrée judiciaire, présidée par le juge Jean-Joseph Lebrun, marquait déjà un tournant symbolique. Pour la première fois depuis plusieurs années, la plus haute instance du pouvoir judiciaire reprenait ses activités dans son siège historique au Champ de Mars.
En présence du Conseil Présidentiel de Transition (CPT), du Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire (CSPJ), des membres du corps diplomatique et de plusieurs ministres, le Premier ministre Alix Didier Fils-Aimé avait prononcé un discours fort :
« La République doit se tenir debout là où elle est née. Le retour de la Cour de Cassation ici, au Champ de Mars, est un acte de foi dans la continuité de l’État et dans la justice comme fondement de notre société. »
À peine la cérémonie achevée, il a concrétisé ses mots par des actes. En descendant dans la rue, à pied, il a voulu montrer que la justice et la gouvernance ne doivent pas se limiter aux discours, mais se traduire par une présence visible et assumée de l’État dans les lieux symboliques.

Marcher jusqu’au ministère de l’Intérieur : un signal de reconquête
La marche du Premier ministre jusqu’au ministère de l’Intérieur n’était pas anodine. Fermé depuis le départ du gouvernement d’Ariel Henry, ce bâtiment demeure un symbole fort du pouvoir exécutif, chargé de la gestion du territoire et de la coordination entre les collectivités locales.
« En allant à pied jusqu’au ministère de l’Intérieur, le Premier ministre a voulu réaffirmer que l’État reprend le contrôle de son territoire. Ce ministère représente la force régalienne de la République, celle qui agit pour la sécurité intérieure et contre les gangs armés », a expliqué un observateur politique.
Pour d’autres, ce geste s’inscrit dans une stratégie bien définie : montrer que la peur ne doit plus dicter la politique d’un gouvernement.
« Marcher à pied au Champ de Mars, ce n’est pas seulement un geste de proximité. C’est un acte d’autorité. C’est dire aux criminels que l’État est de retour là où ils pensaient avoir tout pris », commente un ancien haut fonctionnaire du ministère de l’Intérieur.
Une promesse en voie de réalisation
Depuis plusieurs mois, le Premier ministre Alix Didier Fils-Aimé avait promis de ramener les institutions républicaines au centre-ville avant la fin de l’année 2025. La rentrée judiciaire dans les locaux historiques de la Cour de Cassation et cette marche symbolique marquent le début concret de cette reconquête institutionnelle.
Les travaux de réhabilitation engagés sur le Champ de Mars et dans les bâtiments publics environnants s’inscrivent dans ce plan global. Plusieurs chantiers sont en cours, notamment au Palais National, à la Primature, à la Cour des Comptes, ainsi qu’au ministère de l’Intérieur.
« Nous redonnons à la capitale sa fonction républicaine. L’État doit vivre ici, au centre de Port-au-Prince, pas en périphérie. C’est ici que bat le cœur du pays », a affirmé le Premier ministre lors de son passage devant les ouvriers du ministère.
Un message de fermeté et d’espoir
En parcourant à pied les rues du Champ de Mars, le Premier ministre a voulu redonner confiance aux citoyens et rappeler que la restauration de l’autorité de l’État passe par des gestes visibles et courageux.
Ce déplacement, dans une zone autrefois dominée par la peur et l’insécurité, a été perçu comme un message de fermeté adressé aux groupes armés.
« Le Premier ministre a voulu prouver que le gouvernement n’est plus prisonnier de la peur. En se montrant à pied dans un espace public longtemps délaissé, il a redonné espoir à la population et confiance aux institutions », a déclaré un conseiller politique proche du dossier.
La République reprend ses droits
En une seule journée, celle du 6 octobre 2025, Alix Didier Fils-Aimé a réussi à transformer la rentrée judiciaire en symbole de renaissance républicaine. La justice a repris sa place, et l’exécutif a montré qu’il entend réoccuper l’espace public, pierre par pierre, bâtiment par bâtiment.
Pour beaucoup, cette image du Premier ministre marchant à pied sur le Champ de Mars jusqu’au ministère de l’Intérieur restera gravée comme un moment charnière : celui où l’État a commencé à réaffirmer sa présence et son autorité au cœur de la capitale.
« Ce jour-là, il n’a pas seulement marché sur le Champ de Mars. Il a marché sur la peur », a résumé un magistrat présent à la cérémonie.